Ce document recense quelques merveilles du secteur du multimédia, de l'infographie et du jeu. Des créations de l'esprit bluffantes, captivantes, ébouriffantes, ou simplement atypiques, qui ont marqué tous ceux qui ont eu la chance de les découvrir.
L'histoire commence en décembre 1983 avec l'arrivée de John Lasseter, animateur chez Disney alors âgé de 26 ans, dans le département informatique des studios George Lucas, dans le but, idée novatrice, d'utiliser l'ordinateur non seulement pour mêler maquettes et images réelles, mais aussi pour animer les personnages.
Lorsque Steve Jobs, fondateur d'Apple, rachète l'entreprise à Lucas et la rebaptise Pixar (contraction de pixel et d'art), il fonde du même coup le premier studio d'animation virtuelle, dont la première réalisation, Luxo Jr (1986), nominé aux oscars, est un coup de maître qui séduit dès les premières secondes.
Personnellement, c'était la première fois que je comprenais que l'image de synthèse n'était pas irrémédiablement plus froide et austère que le dessin, et que même, quand elle était bien utilisée, elle avait un pouvoir d'expression largement suffisant pour restituer l'émotion. L'histoire derrière ce premier clip, qui transforma le i de Pixar en lampe d'architecte, est celle d'une jeune lampe qui, ayant découvert un ballon, s'amuse avec jusqu'à malencontreusement le faire exploser, au grand soulagement d'une lampe adulte (que l'on peut supposer être son père) que tout ce manège dérangeait. Hélas pour le père, Luxo Junior (la jeune lampe, Lux comme lumière) trouve un nouveau ballon, dix fois plus gros.
Visionner ce clip (qui, en l'espace d'à peine deux minutes sidère son public !) est chaudement recommandé, ne serait-ce que pour constater comment, grâce au travail artistique, on peut insuffler à l'infographie le supplément d'âme qui trop souvent lui manque, et ceci même avec des moyens techniques extrêmement limités, comme l'étaient ceux de l'époque, en 1986 (le clip originel était en noir et blanc). Et inutile d'accorder une expressivité particulière à la lampe d'architecte, John Lasseter a simplement pris l'objet qu'il avait sous les yeux, sur son bureau !
Pixar se spécialise rapidement dans l'animation virtuelle "à la Luxo", et enchaîne les succès, comme Tin Toy (oscar en 1989), le très bon Toy Story, Toy Story 2, Mille et Une Pattes, Monstres et Cie, et aujourd'hui Le Monde de Nemo, qui sera suivi par The Incredibles.
Plus encore que la synergie entre Disney et Pixar, beacoup pense que le génie de Lasseter a été de faire oublier la technologie au spectateur. Il l'illustre dans sa règle d'or : Je suis un conteur qui utilise l'ordinateur. L'histoire commande. A Pixar, le temps de travail sur le scénario est illimité. La technique passe en second.
Cette micro-entreprise [leur site] (trois personnes, un concepteur-scénariste-développeur professionnel, Jeff Vogel, qui programme dans le sous-sol de sa maison, sa femme qui gère les à-côtés, du genre suivi des commandes, site web etc. et une de leurs amies qui complète l'équipe), créée depuis 1994, est une des très rares structures à pouvoir faire vivre à 100% un concepteur de shareware.
Les jeux qu'ils créent visent des marchés de niche, les jeux de rôles mono-joueurs qui florissaient il y a quelques années, mais rencontrent un grand succès auprès d'une communauté de fans très fidèles.
En tant que petite structure complètement atypique réussissant à faire mieux que surnager dans le contexte ultra-concurrentiel, et parfois fort peu sympathique, des jeux vidéo commerciaux, cette pépite mérite bien de faire partie de nos merveilles ! En effet, les créateurs de shareware professionnels sont excessivement rares.
A titre d'information, ils proposent d'être distributeurs de travaux externes.
Citons les animations d'introduction de films présentant leur maison de production : Tristar, United Artist, 20th Century Fox, etc. Leur style, quoiqu'un peu pompier, a marqué des générations de spectateurs. Monumental et impressionnant, souvent émaillé de références à la mythologie (en général grecque) et au fantastique (ex : licornes). A quand une version, mi-hommage, mi-parodie, fondée sur le panthéon de la mythologie scandinave ?
Suite du grand succès Elite, ce jeu d'exploration spatiale, incluant des aspects de commerce et de combats, est resté fameux pour son univers de jeu et sa technique. Bien que le jeu tienne sur une simple disquette 3,5 pouces, il se proposait de reconstituer notre galaxie entière, avec un réalisme rarement recherché dans les autres jeux. Ainsi, les orbites de tous les corps célestes étaient reconstitués fidèlement, l'inertie des vaisseaux restituée, si bien que le jeu n'était à nul autre pareil. La carte papier fournie avec jeu, avec ses nombreuses étoiles telles que Fomalhaut, Sol ou Deneb Drei, a fait travailler l'imagination de centaines de milliers de joueurs, et la consulter en 3D depuis le jeu était, à l'époque, une vraie révélation quand ce que l'on prenait pour une classique carte 2D se mettait à basculer sous nos yeux émerveillés.
Au-delà du parti-pris d'un certain réalisme et de la volonté de proposer un univers de jeu presque infini, le scénario aussi relevait d'une certaine audace dans la mesure où le joueur, loin d'être guidé dans un parcours d'obstacles prédéfini comme la plupart des jeux le proposaient, est au contraire laissé à lui-même. Le créateur, David Braben, fournit un monde et sa dynamique, et c'est au joueur de composer son menu à partir de la carte. Il pourra ainsi privilégier le commerce ou la contrebande, ou le combat (piraterie ou armée), ou l'exploration, etc. Nombre de joueurs furent déboussolés face à un jeu qui, avec tant de particularités, fut un véritable OVNI. Une nombreuse et ancienne communauté de joueurs fervents atteste des qualités de Frontier.
L'envers du décor de ce jeu est tout aussi atypique : un seul créateur, David Braben, plus de cinq ans de développement, un jeu entièrement en assembleur, sont autant de particularismes surprenants qui font de Frontier une oeuvre résolument à part dans le coeur des joueurs.
Nous n'avons pas pu jouer à cet autre OVNI du jeu vidéo, mais il a constitué un tel phénomène, notamment au Japon où il a connu un succès aussi important qu'inattendu, qu'il serait regrettable de ne pas l'évoquer.
En quelques mots, PaRappa The Rapper est un jeu sorti sans grande conviction par Sony pour la Playstation, consistant à aider un adolescent (en fait, un chien) nommé PaRappa à séduire sa douce, Sunny Funny, en se trémoussant sur des raps endiablés de diverses natures : aux quatre principaux instructeurs (un karateka à tête d'oignon en train de rapper dans un dojo (!), un élan femelle monitrice d'auto-école, une grenouille rastafariste dans un marché aux puces, une poule à la voix stridente en train de cuire des pâtisseries) correspondent quatre sous-branches du rap et du hip-hop (reggae, house, pop, et "old school").
Le joueur a pour tâche, à l'aide de sa manette, de réaliser des figures, imposées ou non, sur la musique, en faisant rapper PaRappa autant que possible en accord avec le rythme et ses divers instructeurs, correspondant à autant de tableaux de jeu. Différents degrés de maîtrise sont atteignables : Rappin good quand PaRappa réussit les figures imposées, puis Rappin cool quand il arrive à s'affranchir des directives pour improviser (freestyle) et se mesurer à ses maîtres.
L'originalité du concept, dû au musicien Masaya Matsuura, et du genre musical (le rap) est enrichie par des choix artistiques souvent inédits (par Rodney Alan Greenblat), avec des personnages en papier animés sur des décors en 3D, un mélange de voix enregistrées en anglais et de musique rigolote et entêtante.
Au final, un jeu certainement bizarre, non-violent et musical, qui a défrayé la chronique et a su, contre toute attente, trouver un public large, assez mixte, qui est allé jusqu'à acheter la console uniquement pour incarner PaRappa The Rapper !
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