Il est difficile de dire si, globalement, le jeu vidéo souffre d'une crise ou d'une simple récession passagère. Ce qui est sûr est que depuis les années 80, de vraies crises ont été constatées ([Plus d'infos]) , et que leur ampleur était largement supérieure à celle que nous serions en train d'endurer.
Fondamentalement, l'avenir du jeu vidéo est radieux, car cette forme de distraction interactive n'est menacée par nulle autre, mais au contraire joue le rôle de super-prédateur à l'égard des formes de cultures traditionnelles. Pour aller encore plus loin, on voit mal par quoi cet art pourrait être menacé alors qu'il englobe toute réalité, à commencer par les autres arts.
Néanmoins, en tant que phénomène franco-français, la crise semble avérée, comme le grand nombre de faillites le suggère fortement.
Les mésaventures françaises pourraient être imputables à ce que l'on a appelé "l'exception française", sans trop être capable d'indiquer si cette exception l'était en terme de qualité ou de bas prix.
Les fondamentaux sur lesquels on peut tabler sont : "pour réussir, il faut faire de bons jeux". Force est de constater qu'à la suite de jeux manifestement ratés (les block-busters récents d'Infogrames-Atari en étant un exemple qui a frappé la presse spécialisée unanime, pour une fois sortie de sa léthargie), il ne faut pas s'étonner que le public, devenu circonspect, boude son plaisir.
Par ailleurs, avec l'avénement conjoncturel de la 3D, mise à toutes les sauces sans nécessairement être d'un secours quelconque à l'intérêt de nombre de jeux, l'équilibre précaire entre les aspects techniques et artistiques (les premiers prenant souvent le pas sur les seconds) s'est retrouvé déplacé encore plus loin de la jouabilité et de l'expérience ludique, au profit d'un exploit technique parfois peu utile. Peut-être que la crise actuelle serait le symptôme d'un retour du balancier.
A ces loupés techniques se sont rajoutés un refus réel de la prise de risques et de l'innovation en terme de concept de jeux. Le foisonnement de suites et le rachat industriel de licences cinématographiques attestent d'un repli nocif sur les valeurs estimées sures, repli qui expose à subir de plein fouet une concurrence qui pendant ce temps n'a pas démérité. Le jeu vidéo n'est pas une martingale, il faut sans cesse conquérir de nouveaux territoires sous peine de perdre la partie.
A cette crise, souvent mise sur le dos du piratage, certains ont trouvé une solution : le soutien de l'état. Cette question est épineuse, et pose des questions de fond qui ne sont pas encore tranchées. L'état a certainement vocation à soutenir des formes d'art en danger, mais peut-on trouver dans les jeux vidéo actuels de quoi légitimer une telle intervention ? Faut-il, en réponse, considérer le jeu comme un homologue de la chanson et du cinéma, et donc lui reverser une part de la taxe sur les supports d'enregistrements vierges ? (le fait que cette taxe soit une aberration scandaleuse est un autre débat).
Alors que l'on ne peut que déplorer que le jeu soit encore appréhendé comme un divertissement anecdotique, futile voire manquant de sérieux, un enseignement demeure : le jeu vidéo est devenu la véritable industrie qu'il promettait d'être, et ce n'est pas parce qu'il a supplanté le disque et le cinéma qu'il s'arrêtera en si bon chemin. Tous les efforts nécessaires en vue d'exploiter convenablement un tel gisement d'emploi et de richesses durables sont-ils déployés, des établissements de formation aux pouvoirs publics ? Rien n'est moins sûr !
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